Placées sur l’œil, ces lentilles fonctionneraient en « utilisant une minuscule puce sans fil et un capteur de glucose miniature intégrés entre deux couches du même matériel utilisé pour les lentilles de contact traditionnelles ».
Les concepteurs, Brian Otis et Babak Parviz, étudient un système d’alerte lumineuse (LED) qui se déclencherait lorsque le niveau de glucose dépasserait ou serait en dessous d’un certain seuil.
Cette technologie n’en est qu’à ses débuts et de nombreuses questions restent à élucider avant d’envisager de proposer cette technologie aux personnes diabétiques, de l’aveu même des concepteurs.
Sources :
Notre article : Autosurveillance glycémique : mesurer le glucose grâce aux lentilles de contact (22/05/2012)
Découvrez notre projet de lentille de contact intelligente (Blog officiel de Google France)
Avis de l’expert : Pr Jean-Jacques Altman, Chef de Service Diabétologie- Endocrinologie-Nutrition, Hôpital Georges Pompidou
La mesure rapide et précise de la glycémie est nécessaire pour soigner le diabète. Les lecteurs modernes remplissent correctement cette mission (en quelques secondes avec une fiabilité autour de 90%). Les méthodes de surveillance sont dites mini-invasives : les piqûres au bout des doigts sont de plus en plus indolores. Les piqueurs étaient initialement utilisés pour faire des prélèvements indolores chez les nouveau-nés.
Toutes les personnes atteintes de diabète souhaitent mesurer leur glycémie sans avoir à se piquer, ce qu'on appelle « mesure non-sanglante de la glycémie ».
Les critères requis
- La précision et la rapidité des mesures doivent être conservées, c'est pourquoi des méthodes dérivées des outils utilisés, par exemple, pour la détermination de la teneur en sucre des fruits pour connaitre la maturation, ne conviennent pas en raison d'une imprécision de l'ordre de 30%. Les "humeurs" (ou fluides corporels : larmes, salive…) contiennent probablement toutes du sucre. Encore faut-il que le taux soit bien le reflet du sang. Par exemple, le liquide céphalo-rachidien (celui qu'on obtient avec une ponction lombaire) contient environ 50 % moins de sucre que le sang. Pour détecter au bon moment l’hypo ou l’hyperglycémie, la vitesse de renouvellement du taux de sucre contenu dans les fluides doit varier avec la même rapidité que celle du sang. Par exemple, l'humeur aqueuse ou vitrée, deux composants de l'œil, ont une vitesse de renouvellement du taux de sucre extrêmement lente. Même avec la mesure continue du glucose (MCG), il subsiste un décalage entre la variation du taux du glucose dans le liquide interstitiel et celui du sang. Des glycémies capillaires quotidiennes sont toujours nécessaires pour calibrer le système, c’est-à-dire évaluer plusieurs fois par jour l’écart entre les valeurs du glucose mesurées et les résultats des glycémies capillaires.
- Accessibilité et disponibilité
De plus, il est difficile de mesurer le taux de glucose dans le liquide lacrymal car celui-ci ne peut pas être recueilli dans des volumes importants. Par ailleurs, le site d’analyse doit être facilement accessible, ce n'est le cas ni du liquide rachidien, ni de l'œil. D’autres chercheurs se sont penchés sur des modes de surveillance non invasifs par exemple, taux de sucre dans la salive ou dans l’air expiré. Aucune de ces techniques n’a reçu l’approbation de l’agence américaine du médicament (FDA). - Tolérance
Bien que la plupart des lentilles se changent quotidiennement, la question de la tolérance du capteur peut se poser. En effet, cette technologie ne sera a priori pas indiquée chez les patients ayant une sécheresse lacrymale assez fréquente.
En conclusion :
- La mesure rapide, précise, continue et non sanglante de la glycémie est nécessaire, par exemple, pour la mise au point d'un pancréas artificiel vers lequel on s'approche trop lentement.
- L’idée des lentilles équipées d’un capteur mesurant le taux de sucre dans les larmes est, a priori, attrayante pour sa qualité non-invasive et son rôle éventuel dans la qualité de vie des patients.
- Cependant, de nombreuses interrogations subsistent, à ce jour, sur la simple "faisabilité" et encore plus sur la fiabilité de cette approche.
- Il faut rester raisonnable, cette technologie, qui n’est pas une thérapie, n’en est qu’à ses débuts. Dans l’hypothèse où elle serait optimisée et validée, elle ne sera, sans doute, pas disponible avant de nombreuses années, voire plusieurs décennies.
Le point de vue de la Fédération Française des Diabétiques
Toute véritable innovation doit permettre d’améliorer la qualité de vie des patients diabétiques. Aujourd’hui, le véritable progrès thérapeutique est la mesure du glucose en continu, qui ouvre le champ de la « boucle fermée » c’est-à-dire le pancréas artificiel.
Bien qu’encore invasive, la fiabilité et l’efficacité de ce dispositif sur l’équilibre glycémique ont été démontrées par plusieurs études et expérimentations. La mesure du glucose en continu pourrait avoir, dès aujourd’hui, des applications immédiates chez les patients diabétiques de type 1 présentant un diabète très déséquilibré.
NB : Après un premier entretien téléphonique entre Google et la Fédération, un RDV avait été proposé. Google et les ingénieurs porteurs du projet n’ont pas souhaité y donner suite…
Lire notre Communiqué de presse du 16/01/2014
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