Alors que l’épidémie de Covid-19 bat toujours son plein, seule la perspective de l’accès à un vaccin efficace permettrait de retrouver, si l’on peut dire, « une vie normale ». Si l’on en croit les récentes et très nombreuses informations, cet espoir est en passe de se concrétiser. Après les annonces des industriels pharmaceutiques, le lancement de la campagne de vaccination au Royaume-Uni, et le flot de théories complotistes en tout genre (consulter notre mémo Savoir repérer les fake news), où en sommes-nous et que faut-il retenir pour les personnes atteintes de diabète et leurs proches, en l’état actuel des connaissances ?
- D’abord, quels sont les objectifs d’une vaccination de masse comme celle contre le coronavirus ?
- A ce stade, six candidats vaccins pour l’Union Européenne
- Une stratégie de priorisation de la population pour l’accès à la vaccination
- Quelle est donc cette stratégie ?
- Une vaccination gratuite et non obligatoire
- La balance bénéfices/risques et le choix personnel de se faire vacciner
- Une vaccinovigilance renforcée sur le long terme
- Une exigence de transparence
D’abord, quels sont les objectifs d’une vaccination de masse comme celle contre le coronavirus ?
Une vaccination peut avoir plusieurs objectifs :
- La protection de la population contre certaines maladies, par exemple contre la diphtérie, le tétanos, le pneumocoque, la méningite chez les enfants , la grippe chez les adultes vulnérables ;
- La protection de son entourage de manière « solidaire », par exemple, la vaccination contre la rubéole ou la coqueluche pour les fœtus ou les enfants ;
- L’éradication d’une maladie comme ce fût le cas grâce à la vaccination contre la rougeole, la variole ou la tuberculose par exemple.
Dans le cas de la Covid-19, ces trois objectifs sont simultanément recherchés : protéger les personnes vulnérables, rompre les chaines de contamination et vaincre cette pandémie pour qu’elle ne devienne pas endémique.
A ce stade, six candidats vaccins pour l’Union Européenne :
L’Union Européenne, constituée de 27 Etats membres dont la France, est chargée de garantir l’accès à la vaccination à ses 448 millions de citoyens. C’est la Commission Européenne, en concertation et après accord de l’Agence Européenne du Médicament (EMA), qui négocie donc avec les entreprises pharmaceutiques. A ce stade, 6 candidats vaccins ont été précommandés et seront susceptibles, après accord des agences de sécurité sanitaire, d’être administrés aux personnes qui souhaiteront y avoir accès. Il s’agit des vaccins des entreprises suivantes :
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}
Vaccin | *Phase clinique | Nombre et caractéristiques des participants à l’essai clinique / la phase | Effets indésirables les plus ressentis connus* | Conservation et administration | Date de disponibilité potentielle |
Pfizer/BioNTech | Phase 3 terminée, déjà administré au Royaume-Uni | 44 000 participants, dont 21 720 âgés de 16 ans et plus qui ont reçu la dose de vaccin et 21 728 un placebo | Douleur au site d’injection (80% des cas), fatigue (60%), maux de tête (50%), myalgies (+ de 30%), frissons (+ de 30%), arthralgies (+ de 20%) et fièvre (+ de 10%). | 2 doses et conservation à -70 degrés | Fin 2020 |
Moderna | Phase 3 proche de sa fin | 30 000 participants dont des personnes âgées mais aussi atteintes de maladies chroniques | Douleur au site d’injection, fatigue, douleurs musculaires, douleurs articulaires, maux de tête, douleurs diverses, rougeur au site d’injection. | 2 doses, conservation à -20° pendant 6 mois ou 30 jours au réfrigérateur | Début 2021 |
AstraZeneca/Oxford | Phase 3 proche de sa fin | 24 000 participants | 2 doses et conservation au réfrigérateur | 200 millions de doses d'ici la fin 2020 | |
Johnson & Johnson | Phase 3 | Deux essais : 60 000 participants (1 dose) et 30 000 participants (2 doses) | Trop tôt encore | 3 mois au réfrigérateur, nombre de doses à déterminer | Début 2021 |
Sanofi/GSK | Phase 2 | 440 participants en phase 2, 30 000 en phase 3 (mai 2021) | Trop tôt encore | Au réfrigérateur | Fin 2021 |
CureVAc | En recrutement phase 2 | Trop tôt | Au réfrigérateur | 2021 |
A ce stade, il n’est pas encore possible de savoir si la vaccination contre la Covid-19 sera nécessaire chaque année, d’autant qu’on ne connait pas encore la durée d’efficacité de l’immunité acquise.
Une stratégie de priorisation de la population pour l’accès à la vaccination :
D’une part, toutes les personnes ne présentent pas le même risque d’être contaminé (notamment en raison de leur profession), ni de développer une forme sévère de la Covid-19, certaines étant plus exposées que d’autres en raison de leur âge ou la présence d’une pathologie associée. D’autre part, le nombre de doses de vaccin sera insuffisant pour vacciner d’emblée l’ensemble des personnes qui y sont favorables.
Pour ces raisons, il est important de définir une stratégie de priorisation de la population. C’est ce que le Gouvernement français a décidé de faire sur la base des recommandations de la Haute Autorité de Santé.
Quelle est donc cette stratégie ?
Première phase, à l’arrivée des premières doses de vaccins dès le tout début d’année 2021 (a priori le vaccin de Pfizer/BioNTech) et jusqu’à fin février : à ce stade, ce sont les personnes âgées résidant en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD ou USLD, par exemple) ainsi que les professionnels du secteur de la santé, du secteur médico-social et du transport sanitaire dont l’activité ne doit pas être interrompue en période épidémique qui pourront être vaccinés (notamment ceux travaillant dans les EHPAD ou USLD).
Deuxième phase – à partir de mars : les personnes ayant plus de 75 ans puis les personnes de 65 à 74 ans ayant une comorbidité, puis les autres personnes de 65-74 ans pourront être vaccinées. Les professionnels de santé, du médico-social et du transport sanitaire, en priorisant les professionnels âgés de plus de 50 ans ou présentant une comorbidité, quel que soit leur mode/lieu d’exercice pourront bénéficier de la vaccination.
A partir de la troisième phase, l’organisation reste encore à confirmer, mais voici comment elle se dessine (recommandations de la Haute Autorité de Santé) :
Troisième phase : l’ensemble des personnes de plus de 50 ans ou de moins de 50 ans mais à risque de forme grave du fait de leurs comorbidités pourront bénéficier de la vaccination. Seront également concernés les autres professionnels du secteur de la santé ou du médico-social et les professionnels issus des secteurs indispensables au fonctionnement du pays (sécurité et éducation par exemple).
Quatrième phase : il s’agira ici de permettre l’accès à la vaccination des personnes fortement exposées au virus du Sars-Cov-2 et qui n’auraient pas été vaccinées antérieurement (car moins de 50 ans et sans comorbidité) : les professionnels dont l’environnement de travail favorise une infection (contacts réguliers du public, milieu clos...) ou les personnes vulnérables ou précaires ayant un pronostic moins favorable en cas d’infection par la Covid-19 (résident en hôpital psychiatrique, sans domicile fixe, détenus...).
Cinquième phase : à ce stade, les personnes de plus de 18 ans et sans comorbidités pourront accéder à la vaccination.
A partir de la phase 2, selon les informations dont nous disposons, les personnes prioritaires recevront un courrier de l’Assurance Maladie leur indiquant qu’elles peuvent bénéficier du vaccin.
A ce jour (11/12/2020), la liste des personnes à risque de développer une forme sévère de la Covid-19 en raison de comorbidités pouvant bénéficier de la vaccination de manière prioritaire n’est pas déterminée. Elle sera fixée prochainement, en fonction des données les plus récentes issues des essais cliniques.
Pour le moment, les enfants ne sont pas concernés par cette vaccination car il n’y a pas encore eu d’étude de tolérance et d’efficacité pour leur classe d’âge.
Une vaccination gratuite et non obligatoire :
Le Gouvernement français a confirmé que le vaccin sera gratuit et qu’il n’y aura pas d’obligation de se faire vacciner. En phase 1 et 2, c’est le médecin traitant qui vaccinera. Chaque décision de vaccination sera prise conjointement par le citoyen et un médecin lors d’une consultation pré-vaccination obligatoire (qui pourra avoir lieu éventuellement en téléconsultation). La décision finale dépendra de la volonté du patient et des recommandations au cours d’une décision partagée dont le consentement du patient devra être consigné. Les usagers et les médecins auront le choix du vaccin au-delà de la phase 1.
La balance bénéfices/risques et le choix personnel de se faire vacciner :
Il est légitime de s’interroger sur l’effet du vaccin sur la santé sur le long terme. La décision de se faire vacciner est un choix personnel qui doit être fait en fonction d’une analyse des bénéfices de la vaccination face aux risques de développer une forme sévère de la Covid-19 ou de la transmettre, en particulier à des personnes vulnérables (proches notamment).
Pour certaines personnes, les bénéfices de la vaccination sont importants compte-tenu du risque de développer une forme sévère de la Covid-19 et des conséquences qu’elle peut entrainer (décès et séquelles éventuelles).
Pour vous renseigner sur vos risques de développer une forme sévère en tant que personne atteinte de diabète, la Fédération Française des Diabétiques vous invite à en discuter avec votre médecin traitant. Elle vous invite également à visionner ou revisionner sa visioconférence « Diabétique, quels sont mes risques face à la Covid-19 ? ».
Et pour en savoir plus sur la balance bénéfices/risques, vous pouvez également consulter la courte vidéo « Les vaccins contre la Covid-19 sont-ils sûrs ? » de l’émission les idées claires sur France Culture.
Une vaccinovigilance renforcée sur le long terme :
Comme les médicaments, les vaccins peuvent présenter des effets indésirables variables du fait de leurs principes actifs. Un processus de vaccinovigilance renforcée sera en place dans le cadre de la campagne de vaccination afin de détecter le plus tôt possible les effets indésirables non connus qui pourraient apparaître et les prendre en charge le plus rapidement possible le cas échéant. Les vaccins considérés comme fiables, efficaces et peu risqués pour l'organisme humain seront ensuite soumis à une surveillance sur plusieurs années et coordonnée au niveau international, européen, national et même régional.
Il est indiqué sur le site de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) que « Dans le cadre de la campagne nationale de vaccination contre la COVID-19, l’ANSM met en place un dispositif spécifique de surveillance renforcée des effets indésirables des vaccins anti-Covid-19 sur le territoire français. (…) Les professionnels de santé ou les usagers peuvent signaler sur le site signalement-sante.gouv.fr tout effet indésirable immédiat ou retardé à la suite d’une vaccination. Le formulaire de signalement sera adapté afin de recueillir des données supplémentaires relatives aux vaccins COVID-19 lors de la déclaration des effets indésirables. »
Une exigence de transparence :
La transparence est le fondement essentiel de la confiance, surtout dans notre pays qui est l’un des plus réticent à la vaccination au monde.
Le gouvernement et toutes les agences sanitaires se sont engagés à communiquer en direct et en toute clarté sur l’évolution des connaissances concernant cette vaccination et sur l’éventuelle apparition d’effets indésirables.
L’action de la Fédération :
La Fédération Française des Diabétiques est très attentive à la situation sanitaire actuelle et à la manière dont la stratégie vaccinale se dessine. Elle se mobilise pour faire des propositions et alerter les autorités de sécurité sanitaire et les pouvoirs publics. Récemment, elle a contribué à une sollicitation de la Haute Autorité de Santé sur les recommandations vaccinales. Elle a notamment rappelé l’importance de proposer un vaccin gratuit, sans obligation, et la nécessaire priorisation des personnes à risque dont les personnes atteintes de diabète pour l’accès au vaccin. Elle sera en outre très vigilante à la mise en place d’une vaccinovigilance renforcée.
*Les différentes phases des essais cliniques : https://www.inserm.fr/recherche-inserm/recherche-clinique/essais-cliniques-recherches-interventionnelles-portant-sur-produit-sante
https://www.leem.org/100-questions/quel-est-le-role-de-la-recherche-clinique
Phase 1 : Le but est de cerner la toxicité du produit. (sur un petit nombre de volontaires)
Phase 2 : Le but est de démontrer l’efficacité du produit, définir la dose maximale ainsi que la tolérance. (sur un groupe de volontaires malades)
Phase 3 : Le but est de comparer l’efficacité du nouveau médicament au placebo ou à un médicament de référence s’il existe, analyser les bénéfices et les risques du produit.
Phase 4 : après autorisation de mise sur le marché, vigilance sanitaire pour repérer les effets indésirables qui ne sont pas encore connus pour assurer la sécurité sanitaire (sur un nombre important de patients)
*Effet indésirable : https://ansm.sante.fr/Glossaire/(filter)/E
Réaction nocive survenant chez un patient, un donneur vivant ou un receveur, liée ou susceptible d'être liée à un produit ou à une activité mentionnés aux articles R.1211-29 et R.1211-30 du code de la santé publique.
Exemples : allergie à un PTA, un excipient entraînant fièvre, frissons, ou douleur, érythème au site d'injection, kératite après greffe de cornée suite à une contamination du milieu de conservation
Est considéré comme grave l'effet indésirable :
- pouvant entraîner la mort,
- susceptible de mettre en jeu le pronostic vital du patient,
- susceptible de mettre en jeu la sécurité d'un ou plusieurs donneurs vivants et/ou d'un ou plusieurs receveurs.
Exemples : transmission d'une maladie infectieuse (paludisme), séroconversion receveur, GVH, choc anaphylactique, décès…
Selon l’article R. 5121-152 du Code de la Santé Publique , un effet indésirable grave est " un effet indésirable létal, ou susceptible de mettre la vie en danger, ou entrainant une invalidité ou une incapacité importantes ou durables, ou provoquant ou prolongeant une hospitalisation, ou se manifestant par une anomalie ou une malformation congénitale ".
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